interview François TOUJAS
|
|
Magazine Marguerite |
|
Date de création : |
|
- Vous dirigez l’EFS depuis quelques années, dites-nous en plus sur votre cursus professionnel
J’ai débuté ma carrière comme professeur de sciences économiques et sociales avant d’intégrer l’Ecole nationale d’administration. Inspecteur général des affaires sociales, j’ai notamment été en charge du contrôle d’un centre régional de don du sang. J’ai ensuite été Chef de la mission « Développement de la formation continue » au sein du ministère de l’Emploi et des Affaires sociales durant ma mobilité, puis j’ai ensuite travaillé sur le droit des malades. Entre 2000 et 2011, j’ai été successivement nommé directeur général de la Mutuelle des Étudiants puis de Mutualité Fonction Publique Services, avant d’être nommé à la tête de l’Établissement français du sang, que je suis heureux de présider depuis 2012.
- Quelle est l’activité principale de l’EFS et son statut ?
L’Établissement français du sang est responsable, en France, des réserves nationales en produits sanguins. C’est un établissement public, placé sous la tutelle du ministre en charge de la Santé et de la Prévention qui, grâce à l’engagement des bénévoles et des donneurs de sang, garantit à chaque patient ayant besoin d’une transfusion de bénéficier du traitement dont il a besoin, partout en France.
L’Établissement français du sang, c’est 10 000 professionnels ; médecins, pharmaciens, biologistes, techniciens de laboratoire, chercheurs, infirmiers, équipes de collecte, en lien avec des milliers de bénévoles, qui s’engagent au quotidien comme dans les circonstances exceptionnelles pour transformer les dons en vies et soigner ainsi 1 million de patients par an.
L’Établissement français du sang, c’est aussi une véritable expertise dans de nombreuses autres activités, comme les examens de biologie médicale, la thérapie cellulaire et tissulaire ou la recherche. Au-delà de la qualification des dons, les laboratoires de l’EFS réalisent différents types d’examens biologiques, hématologiques et immunologiques, des examens indispensables dans le cadre d’une transfusion mais également d’une greffe d’organe, de tissus ou de cellules.
A l’Établissement français du sang, nous donnons au sang le pouvoir de soigner.
- Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans la gestion quotidienne de l’EFS ?
Les conséquences de la crise épidémique se sont fait fortement ressentir cette année encore. Nous avons dû continuer à nous adapter à cette situation, notamment en généralisant l’accueil des donneurs sur rendez-vous et en déployant largement la téléassistance médicale en collecte.
Nous affrontons aujourd’hui une réelle difficulté à recruter du personnel médical, ce qui a un impact considérable sur les collectes de sang.
Nous avons également des difficultés à mobiliser les donneurs, ce qui nous a conduits à organiser des appels répétés aux dons. Ils ont été entendus, et relayés par nos partenaires institutionnels et associatifs mais de nombreux défis restent à relever.
- Comment voyez-vous l’avenir de l’EFS et ses évolutions dans les prochaines années ?
Depuis plusieurs années, l’EFS et le don de sang se transforment afin de s’adapter aux nouveaux modes de vie des citoyens, des donneurs et des potentiels donneurs. Ces évolutions nécessaires, rendues encore plus nécessaires pendant la crise pandémique, ont immanquablement des effets sur notre fonctionnement, nos méthodes de travail et nos relations avec les associations et bénévoles.
Nous sommes dans un tournant de notre histoire et devons à l’avenir relever au moins 7 défis pour renforcer notre modèle éthique et continuer à assurer la mission de service public qui nous est confiée : nous devons retrouver des capacités opérationnelles satisfaisantes pour l’offre de collecte et améliorer l’attractivité des emplois, renforcer la filière française du fractionnement par une augmentation des volumes de plasma collectés, répondre mieux aux besoins des patients avec l’autosuffisance qualitative en produits sanguins, développer des thérapies innovantes, poursuivre la transformation numérique, renforcer la démocratie sanitaire et avoir une responsabilité dans l’encouragement de l’engagement citoyen à travers le don de sang.
- Quelles sont vos relations avec l’union du don du sang la poste orange ?
La relation qui nous caractérise est à la fois riche, pérenne et de confiance. L’union du don du sang La Poste-Orange est le premier groupement de donneur de sang en réseau professionnel, avec une création il y a plus de 70 ans. Les dirigeants de l’association sont intégrés au Comités nationaux d’échange de l’EFS pour participer à la réflexion et au développement de la démocratie sanitaire à l’EFS. Le congrès de l’Union est tous les deux ans un temps fort très important pour notre établissement.
- Que vous apporte l’union du don du sang la poste orange ?
Avec plus d’une centaine de collectes organisées chaque année, et un fort engagement des postiers et des salariés d’Orange, elle participe assurément à cette belle mission de service public qui nous est confiée : faire en sorte que chaque patient puisse être soigné avec le produit sanguin dont il a besoin.
Nous allons poursuivre nos relations avec la nouvelle équipe pour continuer à sensibiliser postiers et salariés d’Orange au don de sang, plasma et plaquettes.
- Les réserves de sang étant au plus bas, pouvez-vous nous faire un point sur l’état des stocks ?
Les tensions sur les réserves de sang sont régulières. La collecte de sang est encore aujourd’hui affectée par les conséquences de la crise sanitaire (difficultés à organiser des collectes en entreprises et en universités, accélérées par la généralisation du télétravail et des cours à distance, plus faible mobilisation des donneurs, difficultés de recrutement de personnel soignant). Les actualités ont aussi un impact sur la fréquentation des collectes, comme dernièrement la pénurie de carburant, qui a conduit de nombreux donneurs à annuler leurs rendez-vous pour un don de sang faute de pouvoir se déplacer ou les épidémies saisonnières cet hiver.
Une chose est sûre néanmoins, c’est qu’une seule poche de sang n’a jamais manqué en France pour soigner les patients grâce à la mobilisation sans faille aussi bien des donneurs, des collaborateurs de l’EFS que des associations et bénévoles.
- De réelles difficultés persistent sur le terrain concernant les collectes mobiles ou en maison du don, que comptez-vous faire ?
Vous le savez et vous le vivez, la collecte en entreprise est aujourd’hui plus difficile à mettre en œuvre. L’un de nos défis à venir est de trouver des moyens de nous adapter aux nouvelles habitudes des donneurs. Ceci ne se fera pas sans les bénévoles, que je souhaite par ailleurs remercier sincèrement pour leur soutien indéfectible.
Ces défis ne pourront pas non plus être relevés sans l’aide de nos collaborateurs, qui se mobilisent sans relâche. En 2022, j’ai obtenu de nos tutelles que nos équipes puissent bénéficier de mesures salariales équivalentes au Ségur de la Santé et puissent faire face à l’inflation. Plusieurs revalorisations salariales ont été concédées. Mais la reconnaissance passe aussi par l’amélioration des conditions de travail et la qualité de vie au travail. J’y suis très attentif. Nos efforts vont se poursuivre avec une réflexion notamment sur l’organisation de nos collectes.
- L’hématologie vit de nouvelles étapes inconnues jusqu’alors (sang rare rhésus plus nombreux) comment voyez-vous l’évolution et l’accompagnement de ces nouvelles données ?
Je l’ai déjà évoqué, mais l’EFS se doit répondre mieux aux besoins des patients avec ce que l’on appelle l’autosuffisance qualitative en produits sanguins. En matière de sangs rares par exemple, nous avons organisé en novembre dernier la deuxième édition de la semaine de sensibilisation aux sangs rares. Une vaste campagne d’information et de sensibilisation a été menée pour recruter, fidéliser et valoriser les donneurs porteurs de groupes sanguins très recherchés, souvent présents au sein des populations d’origine africaine ou caribéenne. S’il est un peu tôt pour dresser le bilan complet de cette deuxième édition, l’appel a été entendu l’année passée, avec une légère augmentation du nombre de donneurs enregistrée dans la plupart des établissements régionaux, et un pic sur la semaine de mobilisation et la semaine suivante.
- Un message pour tous les bénévoles de l’union en ce début d’année ?
S’il fallait retenir un seul message, il serait très simple : merci ! L’avenir du don de sang passe en effet résolument par les bénévoles qui, unis dans la même dynamique, permettent de faire vivre notre modèle de solidarité et permettent de sauver des vies quotidiennement. Alors je tiens encore une fois à remercier chaleureusement l’ensemble des bénévoles de l’UNADSB La Poste et Orange
[L2]Réponse commune avec la question suivante